
Voter ou ne pas voter à l’élection présidentielle ? La réponse théologique d’un père capucin
Par Pierre Legrand.
AVERTISSEMENT LIMINAIRE :
Chers amis lecteurs,
Nous sommes à trois jours du grand cirque électoral républicain, et j’ai cru de mon devoir d’aborder ce sujet épineux et brûlant, éminemment politique ET spirituel puisqu’il regarde la vie dans la Cité et doit, pour un catholique, concourir à l’établissement de la Royauté sociale de Notre-Seigneur pour le salut du plus grand nombre. Il ne s’agit pas ici bien sûr de faire de la politique politicienne mais de mettre chaque fidèle en face de ses responsabilités morales et par voie de conséquence forcément religieuses…Nous nous garderons bien de désigner, même subliminalement, quelque candidat que ce soit et, dans le droit fil du remarquable article de Louis-Hubert Rémy « La Croisade des 7000 », nous tenterons une réflexion à la fois générale et particulière sur le sujet qui nous préoccupe.
Un éminent correspondant, fin connaisseur du monde anglo-saxon, m’a très récemment communiqué une étude argumentée d’un Père capucin sur l’épineuse question du vote à l’élection présidentielle.
Nous tâcherons de soupeser à l’aune de nos convictions semper idem les différents arguments avancés. Puis nous tenterons d’en tirer une conclusion à la fois pérenne et également circonstancielle. Nous terminerons par deux conseils : l’un dans l’ordre des principes et l’autre directement pratique pour les prochaines élections.
Ainsi commenterai-je, conformément à ma méthode personnelle, les propos du Père Capucin par des réflexions EN BLEU Legrand dans le corps du texte lui-même. Qu’il soit bien entendu que ce faisant, je ne me pose pas en donneur de leçons notamment vis à vis d’un religieux bien plus savant et compétent que moi en matière de théologie morale, encore moins d’adopter une posture dogmatique qui tenterait d’imposer mon choix personnel à autrui car en ce domaine nous restons malgré tout dans l’ordre des questions disputées, ce qui suppose que chacun en définitive restera face à sa conscience, éclairée ou non, pour définir ses choix.
Le premier tour des élections approche. En tant que catholique semper idem, nous devons, au-delà même de la question de fond qui va nous préoccuper, nous poser la question de savoir s’il convient de traiter notre approche des deux tours de la même manière et avec le même état d’esprit. Personnellement je n’en crois rien ! Mais chacun se fera en ce domaine, conformément à la liberté des enfants de Dieu, sa propre opinion et en prendra devant Dieu la responsabilité morale.
Venons-en à l’argumentaire de notre capucin. (les accentuations, gras ou soulignés sont de mon fait)
Voter ou ne pas voter à l’élection présidentielle ? La réponse théologique d’un père capucin

par Léo Kersauzie medias-presse.info
Un père capucin a adressé à Civitas (nos lecteurs savent de quelles réserves nous devons entourer cet organisme…) une étude fort argumentée sur l’épineuse question du vote à l’élection présidentielle. Nous croyons utile de la reprendre ici.
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Permettez-moi de préciser d’abord qu’il s’agit de politique, c’est-à-dire un domaine mixte entre le temporel et le spirituel, et donc très délicat à traiter, et où les opinions peuvent varier. (Certes, mais n’oublions pas que le temporel doit être soumis au spirituel sans pour autant empiéter sur l’exercice de l’autorité propre du temporel)
« On doit renoncer au rêve d’un retour pur et simple vers les institutions du passé… La mission de l’Église auprès des sociétés qui ont précédé la nôtre a eu le caractère d ‘une tutelle salutaire exercée sur les sociétés enfants. Aujourd’hui, elle se trouve en présence de sociétés adultes, émancipées par la science, par les progrès économiques et par le développement d’une civilisation qui n’a pas moins besoin que l’ancienne du ferment évangélique. Mais autre est l’attitude du fils adulte, si respectueux qu’on le suppose envers sa mère, et l’attitude de l’enfant. Et une mère sage craindrait d’abuser de son autorité si elle l’exerçait sur celui-là de la même façon que sur celui-ci » (Mgr d’Hulst – Conférence de Carême de 1895.)
Tel était donc déjà au XIXème l’état d’esprit de prélats respectables… Je ne suis pas si sûr qu’en certains domaines nous ayons véritablement atteint l’âge adulte !…
Nous devons tous être absolument unanimes sur le dogme de la Royauté sociale de NSJC, la nécessaire union de l’Église et d’un État chrétien pour le salut des âmes et tout ce que le Magistère de l’Église nous a enseigné comme principes politiques. Mais quant à l’application concrète et ponctuelle de ces principes, dans les circonstances présentes de la séparation de l’Église et de l’État, c’est question prudencielle et selon la conscience de chacun : le 1er mai 1904, Louis Dimier avait demandé à St Pie X ce qu’il fallait faire aux élections ; réponse du saint Pape : “C’est une chose où Rome n’a rien à dire, et qui ne regarde qu’eux seuls, catholiques et Français”.
Il existe en effet une spécificité tout à fait propre à la France, en raison de sa mission divine clairement définie par le pacte de Reims. Aucun catholique semper idem ne peut se soustraire à cette évidence : pour la France, la royauté est de choix divin !
Qu’il soit donc établi entre nous que je ne prétends pas vous donner la seule solution catholique au problème des présidentielles. D’autres prêtres, d’autres laïcs férus de politique chrétienne peuvent avoir et auront sans doute un avis différent ou plus nuancé. Question de conscience. (L’Église a en effet le pouvoir de lier les consciences, même dans une affaire extérieurement temporelle ou pouvant avoir dans l’ordre temporel des répercussions graves, parce que cette affaire est en même temps, par elle-même, de l’ordre spirituel.)
1er point : Peut-on ou doit-on voter ? (le « peut-on » est superflu en la matière ! Si l’on DOIT voter, il est logique que la règle s’impose quelque soit le cas de figure… ; certains d’ailleurs souhaiteraient que le vote soit obligatoire ! la reconnaissance du vote « blanc » ne serait-elle pas comme les prémices d’une telle demande?)
Certains traditionalistes affirment qu’on ne doit pas voter par principe, et s’abstenir de se rendre aux urnes :
— soit par conviction monarchiste
— soit par refus de cautionner l’hérésie du “pouvoir qui vient du peuple”
— soit parce que les anciens Papes (comme Pie IX en 1864) critiquaient le suffrage universel, comme “une plaie qui détruit l’ordre social et qui mériterait, à juste titre, d’être appelé le mensonge universel”
— soit parce que le système actuel est en soi non représentatif et injuste, donnant la même voix à un père de famille nombreuse et à un jeune à peine sorti de l’adolescence, à un magistrat et à quelqu’un qui n’a plus son casier judiciaire vierge, etc…
— soit parce qu’on rentre dans le “système républicain”, qui ne demande qu’à être reconnu, et on tomberait dans le “démocratisme”.
Les « SOIT » adoptés dans la forme de ces opportuns rappels ne me paraissent pas être représentatifs de la réalité: un catholique conséquent aura à l’esprit TOUTES ces raisons, même s’il hiérarchise quelque peu, selon sa psychologie et ses tendances sociétales, l’ordre des priorités.
En 1988, aux présidentielles, le Grand Maître du Grand Orient de France déclarait dans la presse nationale : “Un seul mot d’ordre pour l’élection présidentielle : voter !”. (Peu importe pour qui !)
Ce mot d’ordre a deux mérites :
1/ il est clair
2/ il est concis
Il ne laisse donc aucune place à l’ambiguïté d’un agir hésitant. Il peut se résumer ainsi : « Il FAUT voter…quoiqu’il arrive… »
— La plupart du temps, on élit un homme que l’on ne connaît pas, dont on ignore l’idéologie, l’appartenance ou la dépendance à une société secrète, la fidélité à ses promesses, les initiatives qu’il prendra sans prévenir, etc. On ne saurait être assez compétent pour désigner quelqu’un à la plus haute responsabilité de notre patrie, ou à la Chambre qui fait les lois.
— La “majorité” sortie des urnes est trompeuse. Si 60 % des citoyens votent et 40 s’abstiennent, la “majorité” de 51 % représente en fait moins d’un tiers (31 %) des électeurs.
— Les élections sont occasion de démagogie, de promesses électorales qui ne pourront plus être tenues ensuite, etc.
Nous sommes donc bien là, pour ces motifs quantifiables, en présence d’un « mensonge universel » ! (comme nous l’ont répété plusieurs papes)
Voilà pas mal de raisons – et on pourrait sans doute en ajouter – qui peuvent suffire à justifier l’attitude de ces prêtres et laïcs traditionalistes qui refusent de voter par principe.
Ces prêtres et laïcs sont dignes de créance : aussi bons Français que catholiques, antilibéraux et formés doctrinalement, pieux et zélés pour le bon combat de la Foi et du Christ-Roi. Vous pouvez vous ranger à leur avis selon votre conscience et vous dire donc : “Je ne dois pas voter aux présidentielles”.
Mais, par honnêteté, il faut aussi peser les raisons des autres prêtres et laïcs traditionalistes, aussi pieux et zélés, qui pensent le contraire, et disent : “Il faut voter…” (Ne devraient-ils pas dire plutôt : « on peut voter… » ?)
Les plus formés doctrinalement vous diront que dans les manuels de théologie morale d’avant le Concile et munis de l’imprimatur, les moralistes réputés (Noldin, Müller, Vittrant, Jone, etc.) enseignent qu’il y a une obligation grave de voter si l’abstention aurait pour résultat qu’un mauvais candidat soit élu et nuise gravement au bien commun du pays. Ils parlent donc de péché mortel pour une abstention de voter sans excuse valable. (Mais pour qu’il y ait péché mortel il faut qu’il y ait une acceptation et une connaissance suffisantes de la gravité de la « faute »…cette connaissance est-elle le plus souvent suffisamment ancrée dans les esprits ? on peut en douter, d’autant qu’alors il faudrait que la proposition soit réversible et qu’on se demande s’il n’y aurait pas aussi danger de péché mortel à voter coûte que coûte et par obligation pour un moins mauvais candidat…faisant de l’acte de voter un geste d’opposition plutôt que d’adhésion ?…)
Ils appuieront cette règle morale de décisions du Magistère de l’Église :
— St Pie X aux catholiques espagnols le 20 février 1906 : “Tous se rappelleront qu’il n’est permis à personne de rester inactif quand la religion ou l’intérêt public sont en danger. En effet, ceux qui s’efforcent de détruire la religion et la société cherchent surtout à s’emparer, autant que possible, de la direction des affaires publiques et à se faire choisir comme législateurs. Il est donc nécessaire que les catholiques mettent tous leurs soins à écarter ce danger…” (Lettre à l’évêque de Madrid qui l’interrogeait)
— Pie XII (allocution aux curés de Rome, 10 mars 1948) : “Dans les circonstances présentes, c’est une stricte obligation pour tous ceux qui en ont le droit, hommes et femmes, de prendre part aux élections. Quiconque s’en abstient, spécialement par indolence ou par lâcheté, commet en soi un péché grave, une faute mortelle”.
— Décret de la Sacrée Congrégation Consistoriale de Rome (31.12.1947) : “En considération des dangers qui requièrent la collaboration de tous les gens honnêtes, la Sacrée Congrégation Consistoriale avertit tous ceux qui ont le droit de vote sans distinction d’âge ou de sexe, qu’ils sont dans l’obligation de faire usage de ce droit.”
On peut aussi invoquer l’exemple d’un grand saint contemporain, le Padre Pio, qui se rendait ostensiblement au bureau de vote pour mobiliser ses concitoyens, et qui a réussi à changer les élus socialo-communistes de son secteur par des catholiques. (Cet argument du vote d’un saint, aux facultés quasi-miraculeuses et surnaturelles, ne me parait pas convaincant en ce sens que l’immense majorité des électeurs potentiels ne sont pas des saints!!!)
Mais l’argument d’autorité étant peu prisé de nos jours (hé hé mon cher Père il faudrait donc expliquer pourquoi ! …l’homme aurait-il changé dans ses fondements et ses rapports à Dieu ?), ce sont surtout des “bonnes raisons” qu’on invoque pour faire voter “utile” malgré tout :
— Si la gauche passe à peu de voix d’écart, on en sera responsable par notre abstention.
— “De deux maux, il faut choisir le moindre”… (On sait ce qu’il faut penser, au plan des principes, du « moindre mal »….reportez-vous à l’article de LHR)
— La droite conservera nos écoles hors contrat, la gauche non.
— Et d’autres raisons encore.
Au vu de cette argumentation, et en particulier de la citation aussi forte que nette de Pie XII, il semblerait qu’il faille donner raison aux partisans du vote malgré tout, ou au moins les excuser et là aussi agir et laisser agir selon notre conscience personnelle.
À mon avis, ces deux argumentations qui semblent s’opposer ne sont pas contradictoires, sinon dans leurs conclusions trop catégoriques et qui dépassent les prémisses. Il me semble qu’il faut “tenir les deux bouts de la chaîne”, en gravant bien dans notre esprit ce qui est juste de chaque côté sous un certain angle, ou plutôt sous certaines conditions ou circonstances.
Quel dilemme ! Car l’esprit a besoin de conclure pour se mouvoir dans l’action ! Et si les conclusions sont par trop contradictoires, le fidèle électeur lambda sera dans la confusion, l’expectative mais aussi dans la douleur d’opérer un choix qui par nature ne sera pas totalement éclairé : il s’en suivra une dissonance cognitive qui profitera toujours au système qui ne veut qu’une seule chose : des votants ! Ainsi les circonstances devront être soumises aux principes généraux si l’on veut que l’électeur catholique s’y retrouve…!
Je m’explique : dans chaque cas particulier (mais chaque vote étant un cas particulier, comment concilier cette exigence avec celle de soumettre son intelligence à des principes valables sous toutes les formes de vote ? La réponse – quoique cachée – se trouve dans la question ! Le catholique est ainsi avantagé par rapport aux autres votants car il possède une batterie de réponses liées aux exigences intangibles de sa foi : impossible de voter pour un candidat qui n’est pas intégralement catholique…sauf circonstances très particulières…) où l’on est invité aux urnes électorales, et selon ce cas précis, il faut examiner si on peut ou si on ne peut pas, moralement parlant, coopérer à cette action civique, selon les circonstances. Car en théologie morale, les circonstances sont un élément important qui peut faire que la même action soit bonne ou mauvaise.
Ces circonstances jouent particulièrement dans ce qu’on appelle le “volontaire indirect”, où l’on se demande si on peut poser un acte dont il découlera un double effet lié : un effet bon et voulu, et un effet mauvais et non voulu. Pardon pour ces explications théoriques mais nécessaires. Voici donc un exemple que vous comprendrez tout de suite. Une grosse tempête menace un navire. Le capitaine se demande s’il peut larguer à la mer les contenairs sur le pont, qu’il a le devoir sous contrat de mener à bon port, pour éviter que bateau et cargaison (et équipage) coulent tous ensemble… S’il le fait son action sera bonne même s’il en résulte un effet mauvais, dommageable à tiers, mais non voulu et imposé par les circonstances. (Cette comparaison nautique est par trop matérielle pour convaincre vraiment…la morale (?) du « largage de conteneurs » me laisse dubitatif…mais passons !)
Il nous faut donc examiner la question sous cet aspect des élections (ah! oui…!) , où nous sommes confrontés à un acte électoral à double effet : bon (éviter le communisme, sauvegarder nos écoles, limiter un peu plus les mauvaises lois, etc.), et un mauvais (cautionner le “système”, favoriser un candidat pas vraiment catholique, etc.).
Ce double effet, mon cher Père, sera toujours le résultat d’un choix ! Choix d’ordre moral et politique… Choix qui se traduira donc par la volonté de voter ou de ne pas voter… Le double effet signifie donc que le vote circonstanciel ne sera jamais intégralement bon, mais hybride en quelque sorte et comme marqué d’une obligation de résultat fort précaire, voire ambiguë… Un choix moral peut-il être ainsi durablement connoté ? Toute la question est là… Et Dieu seul connait l’avenir…
La théologie morale enseigne aux prêtres des règles très précises pour solutionner en bonne conscience ce genre de dilemme. Voilà qui peut nous aider à y voir plus clair :
1) Que l’acte ne soit pas intrinsèquement mauvais. (Évidemment…mais par rapport uniquement à la foi de l’Église !)
2) Que l’effet bon soit immédiat. (Problème donc en ce qui concerne le « double effet » !)
3) Que l’intention soit bonne. (Nous sommes là dans le for interne… Qui en jugera ?)
4) Que la cause soit proportionnée. (Proportionnée à quoi ? au double effet ? à l’intention ?…)
1) Voter n’est pas intrinsèquement mauvais. (Ne pas voter l’est ??? je pose juste la question…)
C’est le genre habituel et nécessaire de désignation du Pape ou d’un supérieur de communauté religieuse. C’est la coutume immémoriale en certains pays (la Suisse, par exemple). C’est le meilleur mode pour désigner délégués et responsables dans l’ordre corporatif, etc.
Cette première condition permet donc de voter en principe.
2) Effet bon immédiat ?
St Paul (et l’Esprit-Saint) nous commande de ne rien faire de mal (péché) pour en tirer un certain bien. Ce que la sagesse populaire traduit par ; “La Fin (bonne) ne justifie pas les moyens (mauvais)”. Le Chanoine Berthod, à Écône, avait cette application très marquante pour l’Esprit : “On n’a pas le droit de faire le plus petit péché véniel, même pour sauver sa patrie”.
Attention ! Il faut que l’effet mauvais soit lié à la nature de l’acte.
Pour notre cas des élections, si le vote est un moyen bon en soi (on l’a vu : condition n°1), l’action litigieuse de voter pour un candidat moins mauvais, mais mauvais quand même, pose un réel problème moral. C’est ici qu’il faut compléter les citations des papes et des moralistes.
— St Pie X (suite de la lettre à l’évêque de Madrid) : “Ainsi que le conseillent sagement les articles conformes aux écrits des moralistes, il faut élire les hommes qui paraissent devoir mieux veiller aux intérêts de la religion et de la patrie dans l’administration des affaires publiques.”
— Pie XII (suite de l’allocution aux curés de Rome) : “Chacun doit voter selon le dictamen de sa conscience. Or il est évident que la voix de la conscience impose à tout catholique de donner sa voix aux candidats qui offrent des garanties vraiment suffisantes pour la protection des droits de Dieu et des âmes, pour le bien véritable des particuliers, des familles et de la société, selon la loi de Dieu et la morale chrétienne.”
— Décret de la Sacrée Congrégation Consistoriale (suite) : “Les électeurs ne peuvent donner leurs voix qu’aux listes de candidats dont on a la certitude qu’ils défendront le respect de la loi divine et le respect de la religion dans la vie politique et privée.”
Ces deux dernières citations pourraient suffire à clore le débat (ou en tous cas à le circonscrire de manière assez restrictive…) , et à nous donner une ligne de conduite simple et sûre. (Que voulez-vous dire par là cher Père ? Une ligne de conduite assurément simple et sûre consisterait à ne pas voter alors ? Je n’y suis pas car plus loin vous allez recompliquer (sic!) le problème à cause des vilains candidats « moins mauvais »…ce qui soit dit en passant implique forcément que l’on se plie et adhère à la doctrine du « IL FAUT VOTER » !) Vous pouvez vous y arrêter si vous le jugez suffisant en conscience. (Une solution pour les « pauvres » en conscience, ceux qui n’aiment pas se compliquer la vie et préfèrent rester au niveau des principes ?!) Il me faut cependant recompliquer (sic!) le problème en évoquant les moralistes, dont St Pie X faisait référence à leur autorité en la matière. Recompliquer, parce que tous ne sont pas d’accord sur ces candidats “moins mauvais”.
Certains disent qu’on peut voter pour un candidat notablement moins mauvais sous certaines conditions, d’autres sont plus stricts. En tout cas, chacune de ces opinions reste probable et on peut, dans une situation de choix douteux, suivre ce qui nous semble le mieux devant Dieu. Si j’ai évoqué cette “question disputée”, c’est que non seulement elle nous laisse libre en conscience, mais aussi elle nous engage à ne pas condamner et taxer de péché ceux qui ne jugent pas comme nous, dans un sens comme dans l’autre.
Je m’interroge quand même, cher Père, sur la licéité morale de se complaire dans une liberté de conscience – donc forcément éclairée – qui côtoie volontairement (du moins dans ses choix) le douteux… En ce cas de doute moral, l’abstention pure et simple ne serait-elle pas la meilleure solution ? J’attends des éclairages de la part de gens plus compétents que moi…
Au risque de rallonger cet article déjà bien long, voici quelques citations pour bien comprendre ce point qui me paraît très important.
Du RP Jone, moraliste capucin sous Pie XII, que Mgr Lefebvre ne dédaignait pas de citer : “On ne peut donner sa voix à un mauvais candidat que lorsque cela est nécessaire pour éviter l’élection d’un plus mauvais, mais une déclaration appropriée doit expliquer le motif de cette manière d’agir. Exceptionnellement, on pourrait, une fois en passant, donner sa voix à un mauvais candidat pour éviter un préjudice personnel très grave.” (Par exemple : la fermeture des bonnes écoles pour nos enfants ?)
Bon d’accord ! mais c’est toujours la politique du pire et on en revient sans cesse à un vote d’opposition plutôt que d’adhésion constructive… Car on ne construit pas la Cité Catholique, on ne bâtit pas la royauté sociale avec des briques d’anti-matière…mais avec des fondations solides, éprouvées et avec de bons ouvriers…
La revue “L’ami du clergé”, à laquelle s’abonnait nombre de prêtres de saine doctrine autrefois (quelle saveur cet « autrefois »!!) , résolvait ainsi la question de l’un d’eux sur ce sujet en 1897 : “On ne doit pas faire un mal, même en vue du bien, mais quand il est inévitable qu’on subisse l’un ou l’autre de deux maux, ce n’est pas vouloir le moindre que d’écarter le pire : le vote donné au moins mauvais et moins dangereux des candidats n’est pas une approbation de ce qu’il y a de mauvais en lui, mais la légitime répulsion de ce qu’il y a chez l’autre de plus mauvais et de plus dangereux. On peut donc voter pour le moins mauvais (…) Pour que ce vote soit licite, il faut deux conditions essentielles : la première est que le mal et le danger de la candidature la plus mauvaise soient assez notables pour compenser le mal qu’il y aurait à voter pour un candidat mauvais, quoique moins mauvais (…) La seconde est que les catholiques obligés de se résigner à un vote de cette nature, déclarent publiquement (!!!) qu’en votant ou en conseillant de voter ainsi, ils ne font que céder à une dure nécessité, qu’ils n’ont en vue que d’écarter le candidat le plus mauvais et le plus dangereux, et nullement d’appuyer le candidat moins mauvais auxquels ils donnent leurs voix. Sans cette déclaration (par voie d’affiches ou par le son des trompettes???!) , leur vote resterait entaché de la tare de cette candidature, et ils en endosseraient la responsabilité.” (Devant Dieu je suppose ??? ça irait mieux en le disant…)
Dans un autre n°, la même revue explique au niveau plus théologique du “volontaire indirect” qu’il n’y a pas ici deux effets subordonnés (un bon découlant d’un mauvais) mais simultanés (un bon et un mauvais).
J’admire l’esprit humain, fait à l’image de Dieu !!! C’est extraordinaire ! Après le double effet, nous voilà propulsés dans la sixième dimension avec un « effet simultané » ! Ah…je n’y aurais pas pensé ! Il est vrai que je suis un peu bête et borné et que je n’admire pas suffisamment le génie de l’esprit humain qui invente des tas de choses merveilleuses pour se dédouaner de l’ambiguïté parfois mortelle de ses choix ! Les clercs sont admirables lorsqu’ils font de la théologie (morale). Ils profitent de la complexité naturelle attachée à ces questions pour en rajouter une petite couche et « recompliquer » tout ça avec un aplomb qui me laisse sans voix… Et ils appellent ça une « solution »…
On retrouve la même solution théologique (!!!) dans le Dictionnaire des connaissances pratiques et religieuses, qui date de 1925.
Tout cela permet de dire de manière au moins probable, que ce cas de conscience se résoudrait mieux par le principe “De deux maux (inévitables) il faut choisir le moindre” plutôt que par celui qui dit “On ne peut pas faire un mal pour faire un bien”. Et cela me permet d’évoquer rapidement les deux dernières conditions du volontaire indirect : 3) une intention droite (que l’on doit présumer en tout catholique traditionaliste qui se respecte) et 4) un motif proportionnel, une raison d’autant plus grave que l’acte à poser est grave de conséquences. (Eh bien chers amis, si vous allez voter dimanche prochain, n’oubliez pas de le faire « proportionnellement » (et que ceux et celles qui n’ont rien compris – comme moi ?! – restent chez eux et disent leur chapelet ! Na !)
Retenons surtout qu’il y a ici une question disputée (OUF !!!) , et qu’il y a d’autres théologiens plus stricts (sic!!!) , comme par exemple le jésuite Noldin, qui dit qu’il y a une obligation grave de voter pour un candidat qui soit apte à la charge à exercer, et qu’un candidat vraiment apte doit être catholique, être non seulement prudent et intelligent, mais aussi exercer sa charge selon les principes catholiques. À l’époque de St Pie X et jusqu’à Pie XII, il existait des candidats vraiment catholiques à 100 %, et qui en faisaient profession dans leur programme électoral.
Bien ! Chers amis lecteurs je vous invite à écrire les noms des 11 candidats de dimanche prochain.
Vous faites ensuite trois grandes colonnes ; en haut de ces colonnes vous mettez 3 critères que voici :
1/ ce candidat est-il apte à exercer sa charge ?
2/ ce candidat est-il catholique ?
3/ ce candidat va-t-il exercer sa charge selon des principes intégralement catholiques ? (au sens où nous l’entendons sur ce blogue semper idem !!!)
Alors ce qui va suivre est un jeu d’enfant: si vous réussissez pour l’un des candidats à mettre sur la ligne de son nom trois croix (= OUI) moi je vous le dis…allez voter au premier tour ! Vous êtes néanmoins libre de me désobéir et de choisir une autre solution (c’est à dire aller voter seulement au 2ème tour OU rester chez vous !) Rassurez-vous, comme nous ne sommes pas dans un domaine de foi dogmatique, la théologie morale vous accorde cette liberté de conscience. Après… vos choix ayant entraîné à la fois une posture pratique (aller voter) de votre part et des conséquences (même proportionnelles!!!) au niveau de l’exercice du candidat choisi par vous… il ne faudra pas venir vous plaindre si l’effet escompté ne remplit pas toutes vos espérances !… En la matière, ils n’ont pas quoiqu’on dise vraiment, une obligation de résultat !!!
À ce stade, j’ose à peine conclure car si voter n’est pas intrinsèquement mauvais il nous faut raison garder et bien nous resituer dans le domaine présent. Nous sommes en 2017, non en 1895 ou en 1945… Qu’y a-t-il de plus important pour vous ? les principes généraux qu’instruisent les leçons de l’histoire à la fois civile et religieuse ou les cas par cas selon les circonstances mais avec tous les aléas que cela comporte ?
Je n’ai pas de solution toute faite car on en revient toujours à la responsabilité morale et à la conscience de chacun d’entre nous.
Cet article, que j’ai malgré mes petites observations, trouvé intéressant, doit être lu et médité avec l’éclairage de celui de Louis-Hubert Remy. Non pas qu’ils soient tous deux complémentaires ou antagonistes, mais c’est en réalisant en quelque sorte une synthèse généreuse, que vous trouverez une solution adaptée à votre état, à votre psychologie, à vos orientations politiques et à vos convictions religieuses.
Comme toujours, nous devons implorer l’Esprit Saint de nous éclairer précisément dans un domaine où le fidèle jouit d’une liberté conditionnelle, et non pas relative……
Je vous conseille donc de lire et d’étudier l’article déjà en ligne avant que de vous plonger dans la lecture de notre frère mineur…
Que Dieu et Notre Dame protègent la France !
Pierre Legrand.
Source Medias-Presse.info : http://www.medias-presse.info/voter-ou-ne-pas-voter-a-lelection-presidentielle-la-reponse-theologique-dun-pere-capucin/72649/
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