LES MANDATS VATICANS ACCORDÉS À LA FSSPX
en matière judiciaire
Le 10 mai 2015, Mgr Fellay annonce qu’il a reçu mandat du Saint Siège pour juger, comme juge de première instance, un prêtre de sa Fraternité accusé de « delicta graviora » (une série de délits graves définis comme tels dans le droit canon : en pratique ces affaires concernent en général des abus psychologiques en confession ou des abus sexuels). Fait étrange, cette annonce est faite lors d’une homélie (à l’église FSSPX d’Arcadia, en Californie).
En tout cas, de nombreux médias, dans plusieurs pays, s’empressent de répercuter ce qu’ils considèrent comme une nouvelle (parmi beaucoup d’autres, mentionnons par exemple : http://www.lavie.fr/religion/catholicisme/mgr-fellay-mandate-par-le-vatican-pour-juger-un-pretre-lefebvriste-08-06-2015-63922_16.php).
En réalité, il ne s’agit absolument pas d’une nouveauté et le plus curieux est que même les publications traditionalistes aient cru qu’il s’agissait d’un scoop. Sans être dans les secrets des dieux, toute personne un peu mieux informée que la moyenne au sujet des milieux « tradi » savait que la FSSPX recevait des mandats de Rome pour juger ses propres prêtres depuis au moins l’année 2004. Cette concession romaine s’inscrivait dans la politique « des petits pas » lancée par le cardinal Castrillón Hoyos en l’an 2000 (voir notre section à ce sujet dans l’historique de la Fraternité Saint-Pie X) : il s’agissait, en accordant à la FSSPX des marques implicites mais concrètes de catholicité, de la reconnaître de fait comme non-schismatique et de hâter ainsi la pleine réconciliation. L’article 16 des normae de gravioribus delicts prévoit en effet que la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (CDF) peut déléguer le traitement de ces affaires aux ordinaires. En agissant ainsi vis-à-vis de la FSSPX, le Saint Siège lance un signal fort, qui signifie implicitement que Mgr Fellay est assimilé à un ordinaire du lieu et que l’œuvre de Mgr Lefebvre est reconnue comme faisant parte de la hiérarchie catholique.
Le 27 juin 2015, Mgr Fellay est interviewé dans les colonnes de Présent, un journal du sérail, fondé par feu Jean Madiran. Il y répète que cette délégation de mandat de juge n’est pas une première mais s’inscrit dans une pratique existant « depuis plus de dix ans » (1). Le monde médiatique, traditionaliste compris, tombe des nues.
Comme Mgr Fellay fait partie de ces gens qui ont du mal à tenir leur langue, il a détaillé dans son homélie du 10 mai 2015 d’autres mesures concrètes de reconnaissance de catholicité dont la FSSPX bénéfice de la part de Rome depuis plusieurs années. On peut les entendre à partir de la 34è minute de la vidéo suivante : https://youtu.be/2O-sDMrSYIs?t=2076
Nota CatholicaPedia :
Voici une autre vidéo – sous-titrée en français – du sermon de Mgr Fellay où il dit avoir reçu le pouvoir de Rome pour établir les sanctions canoniques…
(Min. 34:36) :
We are dealed with now as being irregular, at best. Irregular means you cannot anything and so for an example they have prohibited us from saying Mass in the churches in Rome, for the Dominican sisters who had their pilgrimage in Rome in February, they say « no you cannot because you are irregular ». And these people say that, they are people Ecclesia Dei. Now, sometimes, unfortunately, also priests do serious things, and they need to be punished, and when it is very very serious, we have to make recourse to Rome, so we do. And what does the Congregation of the Faith do? Well, they did appoint me as the judge for this case. So I was appointed by Rome, by the Congregation of the Faith to make judgements, canonical Church judgements on some of our priests who belong to the non-existent Society for them and so once again a beautiful contradiction indeed.
Maintenant, nous sommes considérés comme irréguliers, au mieux. Irrégulier signifie que vous ne pouvez rien faire, et du coup, par exemple, ils nous ont interdit de célébrer la messe dans les églises de Rome en février, pour le pèlerinage des dominicaines en février; ils disent : « non vous ne pouvez pas, car vous êtes irréguliers ». Et ces gens disent ça, ce sont des gens d’Ecclesia Dei. Maintenant, parfois, malheureusement, des prêtres aussi font des choses graves, et ils doivent être punis, et quand c’est très, très sérieux, nous devons recourir à Rome, et donc nous le faisons. Et que fait la Congrégation pour la Doctrine de la Foi ? Bien, ils m’ont nommé comme juge dans ce cas. Donc j’ai été nommé par Rome, par la Congrégation de la Foi pour prononcer des jugements, des jugements canoniques d’Église pour certains de nos prêtres qui appartiennent à une fraternité qui, pour eux (Rome), n’existe pas, et nous avons donc bien sûr une fois de plus une belle contradiction.
Ce qui frappe, c’est que, quand Mgr Fellay parle de ces mesures, il ne les envisage que sous l’angle de l’importance ou du pouvoir que cela lui confère. Il va jusqu’à se gausser des contradictions entre les différents dicastères romains : « Nous sommes étiquetés, au mieux, comme ‘irréguliers’, ce qui implique que nous sommes empêchés de faire quoi que ce soit. Par exemple, nous avons l’interdiction de célébrer des messes dans les églises de Rome ». Mais à côté de cela, poursuit-il, « j’ai été mandaté par Rome pour rendre des jugements selon le droit canon, concernant certains de nos prêtres appartenant à un groupe qui, pour le Saint-Siège, n’existe pas (2). Alors, une fois encore, je vois là une belle contradiction ».
Dans cette incroyable homélie de plus d’une heure, on trouve d’innombrables assertons arrogantes de ce type mais on cherche en vain la moindre expression d’empathie pour les victimes d’abus. Cela se passe de commentaire, et cette aptitude de Mgr Fellay est confirmée en plein tout au long du présent Livre Noir.
Pour en revenir spécifiquement aux mandats pour juger en matière de delicta graviora, ces délégations de pouvoirs accordées à la FSSPX sont profondément choquantes pour les victimes d’abus. En effet, comme on peut le lire tout au long du présent Livre Noir, Mgr Fellay est un habitué des négligences graves en matière de répression des abus psychologiques et sexuels, quand il ne les couvre pas carrément.
Prenons en particulier le cas Peignot (voir ci-dessus) : on y voit comment Mgr Fellay a lui-même cassé la seule mesure ferme qu’un de ses subordonnés ait imposée à l’abbé Peignot pour l’éloigner des enfants. En facilitant ainsi la tâche à ce prêtre hautement suspect de pédophilie, Mgr Fellay a mis en danger des dizaines d’enfants. Mais ensuite, il a obtenu sans difficulté de Rome un mandat pour juger le même Peignot pour abus sexuels ! Et encore n’a-t-il intenté ce procès que parce qu’une victime de Peignot s’était plainte à la CDF (Congrégation pour la Doctrine de la Foi) !
Autrement dit, on est pris d’un vertige : quand une victime, aux prises avec le système fellaysien, s’adresse à la CDF pour sortir de l’impasse et faire juger son abuseur, la CDF ne trouve rien de mieux à faire… que de charger du dossier le même évêque Fellay qui a passé des années à saboter toute possibilité de mettre hors d’état de nuire le prédateur présumé. Il est temps que la CDF se rende compte qu’en agissant ainsi elle écœure les victimes, renforce le système qui protège les pédophiles au lieu de le détruire, et accroît le risque d’un scandale médiatique – un de plus.
Dans le cas Abbet, l’aptitude de Mgr Fellay est encore pire, si c’est possible. En effet, comme on peut le lire ci-dessus, Frédéric Abbet avait été une première fois accusé d’abus sexuels en Suisse en juillet 2005. À ce moment-là, Mgr Fellay s’est contenté de lui faire intenter un procès interne, sans en référer à la CDF. Or, à ce moment-là, la FSSPX recevait déjà mandat de Rome pour juger de ce genre de cas. En cachant cette affaire à la CDF, Mgr Fellay a violé l’article 16 des normae de gravioribus delicts, lequel stipule que « Chaque fois que l’Ordinaire ou le Hiérarque vient à connaissance, au moins vraisemblable, d’un délit grave, une fois menée l’enquête préliminaire, il le signale à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi » (3). Mais ensuite, en 2012, quand l’abbé Abbet est accusé une nouvelle fois d’abus sexuels, en Belgique cette fois, Mgr Fellay signale l’affaire à la CDF et obtient mandat pour juger, comme s’il n’avait pas dissimulé la première affaire en 2005. Comment confier mandat à un supérieur pour juger un suspect selon les normae de gravioribus delicts quand ce même supérieur a précédemment violé au sujet du même suspect ces mêmes normae de gravioribus delicts ?… On croit rêver… Comment s’étonner que les victimes perdent toute confiance en l’Église ?…
N’est-il pas temps que la CDF prenne conscience de ses errements et révise en profondeur sa politique de mandats vis-à-vis de la Fraternité Saint-Pie X ?…
Il est évident qu’à l’AVREF, il ne sont pas conscient du problème de l’invalidité de la secte Conciliaire qui éclipse la sainte Église de Dieu depuis le 29 OCTOBRE 1963. Ils ne font donc aucune différence entre les deux entités qu’ils appellent « l’Église ».
Nous avons donc accentué et coloré les “lettres” et “Majuscules” blasphématoires pour l’Église de Dieu.
[1] htp://www.dici.org/documents/entreten-mgr-fellay-a-present-27-juin-2015/
[2] Mgr Fellay fait allusion au fait que, depuis le retrait de sa reconnaissance en 1975, la FSSPX est censée canoniquement ne plus exister.
[3] http://www.vatican.va/resources/resources_norme_fr.html
