NOTRE BATAILLE SUPÉRIEURE….

 

ou nous tenterions en vain de chercher dans notre plan charnel ce “nullam partem” indissociable du plan supérieur qui est celui de Dieu !

 

Par Pierre Legrand.

« Peuples séduits, ou qui pouvez l’être, apprenez qu’il existe une conjuration en faveur du despotisme contre la liberté, de l’incapacité contre le talent, du vice contre la vertu, de l’ignorance contre la lumière ! Il s’est formé au sein des plus épaisses ténèbres une société d’êtres nouveaux qui se connaissent sans s’être vus, qui s’entendent sans s’être expliqués, qui se servent sans amitié. Cette société a le but de gouverner le monde, de s’approprier l’autorité des souverains, d’usurper leur place en ne leur laissant que le stérile honneur de porter la couronne. Elle adopte du régime jésuitique l’obéissance aveugle et les principes régicides du XVIIe siècle ; de la franc-maçonnerie, les épreuves et les cérémonies extérieures ; des templiers, les évocations souterraines et l’incroyable audace. Elle emploie les découvertes de la physique pour en imposer à la multitude peu instruite ; les fables à la mode, pour éveiller la curiosité et inspirer la vocation ; les opinions de l’Antiquité, pour familiariser les hommes avec le commerce des esprits intermédiaires. Toute espèce d’erreur qui afflige la terre, tout essai, toute invention servent aux vues des Illuminés. »

Ainsi s’exprime le Marquis de Luchet dans son essai sur la secte des Illuminés…

 

Il faudra bien en passer par là ! Car enfin beaucoup de catholiques attendent je ne sais quel miracle ou quel conflit mondial qui forcerait en quelque sorte Dieu à intervenir à notre manière — qui n’est pas la Sienne — dans nos misérables projets criminels ou nos petits espoirs de rétablissement d’un ordre ancien que nos contemporains s’acharnent à détruire jusqu’à en éradiquer jusqu’au souvenir lui-même…

Le silence de Dieu, qui peine tant de bons catholiques, n’est lui-même qu’une manière divine de remettre de l’ordre dans notre désordre. Car lorsque Dieu remet de l’ordre, il ne change pas le cours des choses, il respecte la création même lorsqu’elle est vecteur d’un désordre moral ou, à l’opposé, le support matériel d’un changement invisible comme dans le miracle de la transsubstantiation du pain au corps adorable de Notre-Seigneur. Où avez-vous vu que Notre-Seigneur aurait eu la prétention de faire du pain meilleur que ceux dont c’est l’art et le métier ? Il s’en garde bien mais se contente de faire passer une recette boulangère quasiment parfaite sur l’ordre supérieur qui est Son ordre à Lui, le seul qui soit à même de spiritualiser et sanctifier, guérir et régénérer dans Son ordre à Lui qui donne des fruits qui eux seront bien visibles, sauf pour les aveugles volontaires cela va de soi…

Dieu ne fait pas de miracles, tels que peut en attendre l’homme charnel, l’homme de péché. Non ! Il apprend à ses créatures à goûter le prix de leurs forfaits en leur faisant payer le prix fort de leurs égarements. Car sans Lui l’homme, fondamentalement, ne peut rien faire. Qu’est-ce que cela veut dire ? L’homme ne peut rien faire sur le plan supérieur, celui qui est le seul capable de remettre de l’ordre à la manière de Dieu. Mais par contre l’homme est capable de beaucoup de choses dans son ordre à lui qui, lorsqu’il ne compte pas sur Dieu, s’appelle essentiellement un désordre. Car tout ce qui se crée ou se fait sans Dieu n’est que désordre profond, désordre irréparable, qui du plan supérieur nous replace d’un coup dans le plan inférieur, celui qui précisément fait les délices de l’esprit du monde et des anges déchus.

Mais me direz-vous, comment tenter de remettre de l’ordre dans un siècle où tout n’est que désordre y compris et surtout sur le plan religieux ? La réponse est comme contenue dans la question : en remettant de l’ordre non pas comme aimeraient le faire la plupart des créatures, mais comme le fait Dieu c’est-à-dire dans son ordre qui est le seul à être supérieur, ce qui en clair veut dire le seul capable de nous assurer le salut.

En fait nous voulons les conséquences du miracle alors que nous ne connaissons rien à la manière dont le miracle lui-même s’accomplit ! Car cet accomplissement c’est le secret de Dieu… Avez-vous remarqué comment s’opère la Parole de Dieu ? Elle est impérative car elle est faite pour une remise en ordre absolue avec des conséquences et effets visibles dans l’ordre supérieur, car tout ce qui est en dehors de cet ordre ne peut qu’avilir et ternir ce pour quoi nous avons été créés. Notez encore que Dieu s’adresse soit à des personnes soit à des créatures matérielles, selon le but recherché ! S’abaisse-t-il en s’adressant au pain dont il ordonne de changer sa substance en la Sienne ? Nullement ! Il est créateur de toutes choses et règne sans partage sur toutes Ses créatures, des plus humbles (un morceau de pain !!!) aux plus sublimes…

Nous refusons trop souvent de nous laisser hisser dans cet ordre supérieur qui est celui de Dieu. Et la conséquence c’est que nous ne comprenons rien au mystère d’iniquité qui s’accomplit sous nos yeux ! Ou plutôt nous refusons d’en saisir toutes les conséquences car cela arrange bien nos petits projets, nos petits espoirs charnels, nos doute, nos craintes, nos petites vanités et notre refus du réel.

Ce mystère, qui est en grande part celui de l’aveuglement spirituel et donc un châtiment, est aussi une leçon de choses car il est censé nous apprendre la sainteté de Dieu dans Ses résultats, l’autorité de Dieu dans le miracle de Sa parole, le silence de Dieu dans Sa Présence agissante, le respect du temps de Dieu qui est si différent du nôtre, l’amour insensé de l’attente de Dieu qui nous aime jusqu’à la fin des temps et comble nos désirs plus que nous comblons les nôtres de nos petits désirs mesquins, de nos affections charnelles et de nos pensées égoïstes…

Nous sommes doublement infidèles lorsque nous nous voilons la face en refusant d’apprendre auprès d’un maître si sûr et si parfait ! Nous mélangeons allégrement notre plan à nous et ses fruits amers, avec le plan de Dieu et ses effets supérieurs, insensés que nous sommes qui refusons d’aimer et d’être aimé par Celui qui a tout créé par amour !

Nous ne pouvons être nullam partem avec tout ce qui afflige et éclipse l’épouse du Christ si nous refusons de tout analyser, penser et recevoir dans l’ordre supérieur qui est celui de Notre-Seigneur.

Cette incapacité constitutive de notre être a des conséquences graves, si nous n’y portons remède ! Impatience, incompréhension, rébellion, résistance à la grâce, esprit scientifique, amour des vains dialogues et stériles bavardages, refus de reconnaître son ignorance par orgueil et manque de confiance, corruption de nos actes de foi, d’espérance ,de charité et de contrition…etc…

 

La matière elle-même est au service de Notre-Seigneur car elle sert aussi à raviver le feu de nos luttes et pas seulement celui des passions ; elle est capable d’expiation pour venger sa révolte contre la vie, la vertu et la beauté ! Et nous ? Valons-nous moins que la matière ? Ne sommes-nous pas capables de charrier la vie en nous obligeant à cette épuration salutaire de nos corps, de nos instincts, de nos intentions et de nos actes ?

Regardez comme c’est admirable lorsque les deux plans se rejoignent dans une synergie proprement céleste : dans l’Eucharistie le pain, nourriture terrestre, fait place à celui des voyageurs pour l’au-delà, car ce Pain de Vie ne peut être reçu que si nous acceptons qu’Il vive en nous véritablement et que, comme la substance du pain, nous acceptions de laisser notre substance pécheresse être remplacée par celle de ce Dieu d’amour qui ne redoute rien tant que nos petites piétés satisfaites et nos fidélités fatalistes.

Nous devons être acteurs de notre destin ! Nos actions de grâce ne servent à rien si nous ne mettons les grâces effectivement reçues au service exclusif de Celui qui attend de nous un sursaut d’amour et de confiance ! Il a vaincu le monde…et nous, nous serions impuissants à nous vaincre nous-mêmes sans faire au moins l’effort d’essayer sous prétexte que c’est trop dur, trop anxiogène ou que sais-je encore… ?

Nous nous sentons usés par la vie parce que nous avons de la vie une conception encore trop charnelle, trop mondaine… Alors que la vraie vie nous appelle à nous dépasser ans cesse et à nous mettre en marche pour elle, sans nous encombrer de ce surplus de bagages que d’aucuns se complaisent à traîner avec eux…comme ces vieilles personnes qui ont connu la guerre et qui ne jettent rien, faisant de leur demeure comme ils font de leur âme, un encombrement de mille choses superflues dont ils auront bien du mal à se séparer lorsque l’heure viendra pour eux de n’avoir qu’un seul bagage : celui de l’amour de Dieu…et de son prochain !

Bien souvent le dégoût vient de ce que nous ne nous contentons pas que de l’essentiel et que nos âmes encore un peu païennes ont besoin de tous ces gris-gris qui leur donnent une importance qu’elles n’ont pas. Après le dégoût viendra le manque d’appétit qui sera suivi par tout ce qui peut exciter notre appétit de façon artificielle, créant dans notre imaginaire des paradis et des mirages d’une existence terrestre qui serait sans fin et sans mort…

Chassons les drogues qui donnent à nos vies de mauvaises manières d’être et de vivre. Laissons nos cœurs aimer le silence de Dieu et la juste punition qu’Il nous inflige. Vous ne vous sentez pas coupable ? Alors vous l’êtes bien davantage encore ! Reprenez-vous et contemplez les desseins de Dieu avec cet œil baptismal qui fait de vous des voyageurs de première classe pour un plan véritablement supérieur.