Ce n’est pas chez nous qu’on ment, …c’est chez les autres !
Plus ils sont diplômés, plus ils racontent des mensonges.
Jusqu’à Vaticand’Eux, la chaire de vérité était l’Église, et non l’Université.
Cher amis lecteurs, nous vous donnons en deux partie (une première aujourd’hui et la seconde suivra) deux textes fondamentaux « Pour en finir avec les ennemis de nos traditions »…
Pour en finir avec
les ennemis de
la Sainte Ampoule
et du Sacre de Clovis
par le Chanoine Cerf
Histoire et description de Notre-Dame de Reims
1841
pour en finir avec
les imposteurs
par Monseigneur Gaume
L’ÉVANGÉLISATION APOSTOLIQUE DES GAULES
2è partie de
L’Évangélisation Apostolique du globe
1879
Chanoine CERF
Histoire et description de Notre-Dame de Reims
1841
Du sacre de Clovis et des Mérovingiens, t. i, p. 546
Clovis et les rois de la dynastie mérovingienne ont-ils été sacrés ? Ou bien devons-nous descendre jusqu’au temps de Hugues Capet, de Louis le Bègue, au moins de Pépin le Bref, pour trouver un monarque français marqué au front de l’huile sainte ?
Problème difficile, qu’il semble téméraire de vouloir agiter. Au congrès scientifique tenu à Reims en 1845, cette question fut débattue : on se prononça pour la négative, sans apporter aucun argument nouveau. Des membres réclamèrent, prétendant que l’on avait glissé trop légèrement sur plusieurs textes de saint Grégoire de Tours et de Flodoard. Le procès est donc encore pendant devant le tribunal de l’histoire. Le résoudrons-nous ? Nous ne l’espérons pas : nous voulons seulement réunir les arguments qui nous semblent devoir peser le plus dans la balance.
Quand on veut établir un point d’histoire, deux méthodes se présentent : les autorités et l’induction. Si le critique peut présenter, en faveur du sentiment qu’il embrasse, les témoignages formels d’auteurs contemporains et dignes de foi, si le fait est en lui-même grave, capable d’attirer l’attention publique, il ne restera aucun doute ; le fait est dès lors acquis à l’histoire, reconnu comme incontestable. Mais si l’on est privé de témoignages aussi certains, peut-on encore arriver à la certitude historique ? N’y a-t-il pas des arguments d’induction que la philosophie ne regarderait point comme entièrement démonstratifs, mais que l’histoire adopte parce qu’ils donneront la probabilité et une certitude ordinairement suffisante ?
Le fait du sacre de Clovis n’est point revêtu de ces preuves positives, devant lesquelles la critique ne peut que s’incliner : saint Grégoire de Tours, Fortunat., etc., n’ont point parlé du sacre de nos rois chrétiens. Ce n’est donc pas, à nos yeux, un fait tellement incontestable, que l’histoire doive l’enregistrer comme revêtu de tous les caractères de la certitude. Mais n’y a-t-il pas, en faveur de cette opinion, des arguments capables au moins de faire impression sur les esprits ? Le lecteur en jugera.
Nous nous adressons d’abord à ceux qui, comme nous, admettent l’authenticité de la Sainte-Ampoule. À leurs yeux, la Sainte-Ampoule est une huile miraculeuse ; elle est donnée à saint Remy par un moyen extraordinaire (1). Qu’importe qu’elle soit apportée du ciel par un ange ou par une colombe ; qu’elle ait paru tout à coup sur l’autel, à la prière de saint Remy, ou bien que le vase en forme de colombe, suspendu au-dessus des fonts baptismaux, ait été rempli d’une huile miraculeuse ? Nous reconnaissons ici un prodige : la Sainte-Ampoule fut envoyée du ciel au jour du Baptême de Clovis.
Mais n’a-t-elle servi qu’à l’onction du Baptême ou de la Confirmation ? A-t-elle été versée une troisième fois sur le front du fier Sicambre, déjà consacré comme chrétien, comme soldat du Christ, pour compléter l’œuvre de sa régénération et en faire le roi chrétien ? Voilà le point précis de la discussion.
Or nous croyons qu’outre l’onction baptismale, qu’outre l’onction de la Confirmation, il y eut une troisième onction (2), qui est celle du sacre proprement dit. Nos preuves ne sont pas certaines, nous ne le prétendons pas, mais nous les croyons probables.
I. Nous demanderons donc à ceux qui nient la réalité de ce sacre, tout en admettant le respect religieux de nos pères pour la Sainte-Ampoule, à ceux qui prétendent, par conséquent, que de Clovis à Pépin, la Sainte-Ampoule est restée sans objet, nous demanderons, dis-je, pourquoi celle fiole conservée sans aucun usage pendant près de trois cents ans dans l’église de Reims ? Parce que, dira-t-on, venue du ciel, elle a servi au Baptême de Clovis.
Mais alors, pourquoi est-elle, tout à coup, sans aucun précédent, employée pour sacrer les rois de la seconde dynastie ? D’où vient à l’archevêque de Reims cette étrange idée de tirer du trésor de Saint-Remy une huile longtemps figée, durcie ; de la mélanger avec l’huile bénite par les prières de l’Église ? Comment cette innovation n’a-t-elle laissé aucune trace dans l’histoire ? Comment aucune réclamation contre une cérémonie aussi insolite ne s’est-elle élevée ? N’était-il pas à craindre cependant que le peuple, toujours superstitieux, toujours porté à tirer des conséquences pratiques des moindres faits extérieurs, n’en prît occasion de déprécier le chrême employé dans l’ordination sacerdotale, et ne fût induit à regarder le sacre des rois comme supérieur au sacre des évêques ?
En admettant, au contraire, que Clovis et quelques-uns de ses successeurs ont été sacrés, nous expliquerons facilement la conservation de cette huile mystérieuse, pour l’unique usage auquel le ciel semble l’avoir destinée. Nous comprenons, et l’importance attachée à cette précieuse relique, et le soin avec lequel elle est gardée dans le tombeau de saint Remy, et le respect religieux qui empêche de la transporter hors de nos murs, et enfin ces précautions minutieuses pour la faire passer simplement du tombeau de saint Remy jusqu’à la cathédrale, cette escorte, ces barons livrés en otage, l’abbé ne la remettant qu’à l’archevêque en personne, le prélat prêtant serment de la rendre à la fin de la cérémonie. Ainsi, d’après nous, la Sainte-Ampoule ne sert au sacre des rois que pour cette raison : saint Remy l’a versée d’abord sur le front courbé du fier Sicambre, devenu le premier roi très chrétien.
Leber, adversaire du sacre de Clovis, l’a dit formellement : La Sainte-Ampoule et le sacre de Clovis sont deux faits corrélatifs : on ne peut toucher au miracle sans écarter le sacre qui l’aurait motivé ; mais, réciproquement, si nous admettons un fait miraculeux quelconque, le sacre suivra, pour ainsi dire, nécessairement.
II. Poursuivons notre démonstration, Pour ceux mêmes qui n’admettent point que la Sainte-Ampoule remonte à Clovis et à saint Remy, il est un fait incontestable : la ville de Reims a été, de tout temps, choisie pour le sacre des rois. Pourquoi ce privilège incontesté jusqu’au temps d’Yves de Chartres ? (3) D’autres villes, cependant, peuvent alléguer des titres à cet honneur.
La ville de Tours n’a-t-elle pas eu pour évêque saint Martin, dont le culte était, au Moyen-Âge, si populaire dans toute la France, et dont les rois se regardaient comme les vassaux, portant le titre de chanoines de Saint-Martin ?
Paris se glorifie d’être la capitale du royaume de France, la ville où se tiennent dès lors les champs de Mars et de Mai.
Chartres est la ville sainte des Druides, la ville chère aux Gaulois, le lieu des états généraux de l’ancienne Gaule ; elle apportera même, si l’on veut, ses titres religieux et la consécration de son sol à la Vierge qui doit enfanter : Virgini parituræ.
Sens jouit du titre de métropole de Paris ; pourquoi donc, avant le temps de Louis le Gros, ne réclame-t-elle point pour ses pontifes le droit de sacrer les rois de France ?
Orléans est placé au centre de la France ; il a été, sous les fils de Clovis, la capitale du royaume.
La ville de Metz, siège des monarques austrasiens, n’a-t-elle point un droit certain à revêtir de la sanction religieuse l’inauguration d’un maire du palais d’Austrasie, porté au trône par le concours des peuples de la France orientale ?
Nous n’énumérerons point les titres, les privilèges que pourraient apporter Laon, Soissons et tant d’autres villes du royaume.
Reims, au contraire, si l’on n’admet pas le sacre de Clovis, n’a aucun titre à l’honneur qui lui est décerné, et aucune raison de convenance ne milite en sa faveur ; et cependant elle jouit du droit incontestable de sacrer les rois de France.
Pourquoi donc ce privilège ? Hâtons-nous de le dire : l’exemple du premier roi très chrétien a marqué pour tous ses successeurs la place où ils doivent aller recevoir l’onction royale. Saint Remy, en conférant à Clovis, après le Baptême et la Confirmation, le caractère de roi chrétien, a transmis aux pontifes, ses successeurs, le droit dont ils ont joui dans la suite des âges, droit que confirmèrent les papes et les rois (4).
III. Une troisième raison se tire de l’emploi du saint-chrême dans le sacre de nos rois.
C’est, nous le savons, un privilège particulier à nos rois. Les autres princes de l’Europe ne sont oints que de l’huile des catéchumènes, comme le prescrit le Pontifical romain, et les souverains pontifes ont réservé pour les évêques et pour eux-mêmes le droit exclusif de recevoir l’onction du chrême, « ut ostendatur quanta sit differentia inter auctoritatem pontificis et principis auctoritatem ». Mais si Clovis n’a point été sacré avec la même Sainte-Ampoule qui, obtenue par un miracle, avait servi pour l’onction baptismale, pourquoi donc le privilège de se servir du chrême aurait-il été accordé aux rois de France et refusé aux autres princes de l’Europe ? Rome a-t-elle donc aussi deux poids et deux mesures ? Et les empereurs germaniques, les rois d’Angleterre ou d’Espagne n’auraient-ils point réclamé contre une distinction qui les mettait au-dessous des rois de France ?

Baptême de Clovis, avec la colombe du Saint-Esprit
Grandes Chroniques de France de Charles V
Paris, vers 1375-1380
IV. À cette argumentation négative, on voudra peut-être nous opposer le silence des annalistes anciens, le silence du poète Fortunat, contemporain ; le silence de saint Grégoire de Tours, le père de l’histoire ; on nous dira que Hincmar est le premier qui attribue à saint Remy l’honneur d’avoir sacré Clovis, que les bulles d’Hormisdas et de Victor II, que le testament de saint Remy sont relégués par les savants au rang des pièces apocryphes ou des documents douteux.
Nous pourrions répondre que l’objection elle-même est toute négative, et qu’il nous est permis de lui opposer une réponse négative ; que, jusqu’ici, nous ne nous sommes pas appuyé sur ces pièces rejetées par quelques savants, admises par d’autres d’une autorité au moins égale dans la critique. Nous pourrions dire que notre sentiment a pour lui un témoignage qui a coutume de peser beaucoup dans la balance des critiques, l’autorité du savant que l’on appelle le docteur par excellence, l’Ange de l’École.
Saint Thomas d’Aquin, qui fleurit au XIIIe siècle, regarde les grâces attachées à la personne de nos monarques, et entre autres le don de guérir les écrouelles, comme découlant de ce baume céleste dont Clovis fut oint, ainsi que ses successeurs ; il assimile l’onction de Clovis à celle des sacres suivants ; elles sont du même genre. Certes, on n’accusera pas saint Thomas d’avoir sacrifié la vérité au plaisir de reproduire une tradition nationale, agréable à nos rois, lui qui n’était pas sujet de la France. Osera-t-on dire que ce savant docteur a suivi une erreur populaire, accréditée sans raison, et que réprouvent toutes les données de l’histoire ? Il nous faudrait donc aussi regarder comme appuyées sur un fait erroné les bulles des souverains pontifes, qui confirmèrent à l’archevêque de Reims le droit exclusif de sacrer les rois, comme au successeur de saint Remy ?
Le pape Innocent II, faisant lui-même à Reims la cérémonie du sacre de Louis VII, n’avait-il point une joie extraordinaire d’oindre ce jeune prince avec le baume divin dont saint Remy s’était servi pour sacrer Clovis, roi des Français ?
V. À ce silence de l’histoire, nous pouvons opposer un argument de prescription. Tous les siècles déposent en notre faveur. Nous avons vu, au XIIIe siècle, la croyance du sacre de Clovis confirmée par l’autorité de saint Thomas et du pape Innocent II ; au XIIe siècle, nous la trouvons consignée dans les réclamations du Chapitre de Reims, au sacre de Louis VI. Ce privilège de sacrer les rois, disent les députés rémois, ce droit a été concédé à saint Remy par le roi Clovis.
Au XIe siècle, en 1059, Gervais, l’un des plus grands prélats de l’Église de Reims, sacrait le jeune Philippe Ier, âgé de sept ans. Le roi Henri Ier était présent, ainsi que les légats du pape, les archevêques de Sens et de Tours, et un grand nombre d’autres prélats. Avant de verser l’huile sainte sur le front du prince, Gervais saisit le bâton que la tradition reconnaissait avoir été envoyé à saint Remy par le pape Hormisdas, et, d’une voix retentissante, il déclara devant tous les évêques qu’à lui et à ses successeurs appartenait le droit d’oindre et de couronner les rois de France. Ce bâton qu’il portait était, disait-il, une marque de ce pouvoir et de la dignité de primat dont il jouissait dans les Gaules. II fit lire aussitôt les bulles d’Hormisdas et de Victor II, lesquelles ne furent contredites par aucun des évêques présents à la cérémonie (5).
Mais remontons encore la chaîne des siècles, et montrons, sous les rois sortis de Pépin, le sacre de Clovis reconnu comme le modèle sur lequel se règle le fondateur de la seconde dynastie.
Le témoignage d’Hincmar est formel. Charles le Chauve s’était rendu à Metz pour se faire couronner roi d’Austrasie à la place de son neveu Lothaire, mort en Italie. Metz était de la province ecclésiastique de Trèves, et cependant les évêques, en l’absence de leur métropolitain, prièrent l’archevêque de Reims de faire la cérémonie. Hincmar accepte cet honneur avec joie. Avant de couronner le roi, il adresse la parole aux évêques présents ; il leur dit que Charles, en se faisant sacrer, veut se conformer à ce qui est recommandé dans les Saintes Écritures ; il rappelle l’exemple de Louis le Débonnaire et de Clovis oint et sacré par saint Remy : « peruncti et in regem sacrati ». Et personne dans l’assemblée ne réclame ; et le roi lui-même, qui se piquait d’érudition et qui, jusque dans son camp, s’appliquait à l’étude, ne conteste point une assertion si nouvelle, si étrange ! Et celui qui avance un fait aussi éclatant, que l’on prétend controuvé, c’est Hincmar, qui, par sa sagesse, sa science, sa vertu, a passé pour le premier prélat de son temps.
En 816, lorsque le pape Étienne IV versait à Reims l’huile sainte sur le front de Louis le Débonnaire, le sacre de Clovis était admis comme un fait bien avéré, sur lequel ne s’élevait aucun doute. La charte de ce prince est formelle : elle distingue les trois cérémonies du Baptême, de la Confirmation, du sacre royal, toutes trois accomplies en la personne de Clovis : « In qua », dit-il, en parlant de l’église bâtie par saint Nicaise, « in qua auctore Deo et cooperante sancto Remigio, gens nostra Francorum, cum æquivoquo nostro rege ejusdem gentis, sacri fontis baptismate ablui, ac septiformis Spiritus Sancti gratia illustrari promeruit ; sed et ipse rex nobilissimus ad regiam potestatem perungi Dei clementia dignus inventus est… » Il est impossible de trouver des expressions plus claires.
Voilà donc la croyance générale incontestée sous le fils de Charlemagne.
Quand saint Boniface versa l’huile sainte sur le front du fondateur de la dynastie carlovingienne, il est dit expressément que Pépin suit en cela la pratique des anciens, secundum morem majorum (6).
Mais quels sont ces anciens qu’imite ainsi le maire du palais, devenu roi ? S’agit-il des rois de Juda, les seuls qui eussent jusqu’alors été sacrés par l’onction de l’huile sainte ? Il s’agit évidemment de quelques-uns des rois issus de Clovis. Mais si l’un des monarques de la première dynastie a été sacré, quel fut cet heureux prince pour qui eut lieu ce rite d’inauguration religieuse ? Et si quelques-uns des fils de Clovis ont été marqués de l’huile sainte, pourquoi refuser ce privilège au fondateur de cette dynastie ?
Nous avons poussé nos investigations aussi loin que possible et nous pouvons conclure : Pépin ne fut pas le premier roi des Francs marqué au front de l’huile sainte des sacres.
VI. Un fait vient encore corroborer notre sentiment. Caribert conteste à Dagobert la couronne royale des Francs ; une assemblée des seigneurs du royaume est convoquée à Reims pour terminer ce différend (629). Les barons se prononcent en faveur de Dagobert, et les habitants de Reims sont les premiers à le saluer du titre de roi. Pourquoi donc ce choix de la ville de Reims pour mettre fin à ces prétentions ? Sinon parce que Reims est la ville des sacres, et que le roi proclamé, élevé sur le pavois, doit être aussitôt marqué de l’onction sainte, et recevoir, avec la sanction religieuse, une autorité désormais incontestable aux yeux de tous.
VII. Nous n’invoquerons pas le témoignage des historiens qui admettent le sacre des princes mérovingiens. Doublet, dans son Histoire de Saint-Loup ; D. Chenu, dans la Vie des évêques de Reims, reconnaissent saint Rigobert comme consécrateur des rois DAGOBERT II, CHILPÉRIC, et THIERRY ; Belforest prétend, dans un endroit, que Pépin est le premier roi sacré, et il admet ailleurs le sacre de CHILDEBERT II ; Waltronne assure que DAGOBERT 1er, SIGEBERT, THIERRY et CHILDEBERT ont été oints de l’huile sainte ; Yves de Chartres lui-même, l’adversaire des droits de l’Église de Reims, confesse que CHARIBERT et GONTRAN ont été sacrés à Orléans. Ces historiens sont modernes, et bien que leur autorité puisse contrebalancer celle des auteurs, également modernes, qui nient le sacre de Clovis, nous préférons remonter aux sources, discuter les preuves que l’on tire du silence des auteurs contemporains, et tirer les conséquences des faits que l’histoire nous fournit.
VIII. Le témoignage le plus puissant pour nous est celui de saint Remy lui-même. Avec Flodoard, nous distinguons trois testaments du saint apôtre : le dernier et le plus étendu est cité dans notre historien ; un autre avait été composé sept ans auparavant, et le troisième est antérieur de sept autres années.
Dans le texte plus développé que rapporte Flodoard, il est trois fois question de Clovis :
1° « Le roi Clovis, que j’ai reçu, dit saint Remy, au sortir des fonts baptismaux, étant encore païen, ignorant le Dieu véritable, a voulu dès lors me faire des présents ». Saint Remy les refuse, et se concilie encore plus par ce désintéressement le chef des Sicambres.
2° Dans un second passage, le saint veut que son testament soit religieusement observé par les évêques, ses successeurs, et défendu par les rois de France, ses très chers fils, qu’il a consacrés au Seigneur, dans le Baptême, par le don de Jésus-Christ et par la grâce de l’Esprit-Saint. Ces mots : consecravi per Baptismum, ne peuvent évidemment s’entendre du sacre ; ils supposent seulement que saint Remy a baptisé les fils de Clovis (7).
3° Peu après, il ajoute que si les biens laissés par lui à son Église sont envahis par un laïque, celui-ci encourra l’excommunication ; mais il faudra user de ménagement, et aller jusqu’à sept monitions, si l’usurpateur appartient à cette famille royale « que, pour l’honneur de la sainte Église, pour la défense des pauvres, lui, saint Remy, a choisie, élevée au comble de la majesté, pour régner à jamais, qu’il a reçue au sortir des fonts baptismaux, qu’il a marquée des sept dons de l’Esprit sanctificateur, et qu’il a placée au rang des rois par l’onction de ce même saint chrême ; per ejusdem sacri chrismatis unctionem ordinavi in regem ».
Ces paroles de saint Remy sont expresses : elles ne peuvent laisser aucune équivoque, aucun doute ; comme, plus tard, dans la charte de Louis le Débonnaire, il est question très explicitement du Baptême, de la Confirmation et de l’onction royale des sacres :
« quos per Baptismum consecravi, quos dono septiformis Spiritus consignavi, quos per ejusdem sacri chrismatis unctionem ordinavi in reges ».
Et ce testament de saint Remy n’a pu être altéré ; on le conservait avec le soin le plus grand dans les archives de l’église de Reims :
« Salvo et inviolabili testamento tertio Remigii, Francorum apostoli »
disait le pape Sylvestre II, écrivant à l’archevêque Arnauld. (V. Baronius, t. IV, ad ann. 999)
Aussi le président Brissot reconnaît à cette pièce, qu’il caractérise de elegans testamentum, qu’il avait tirée lui-même des archives de l’Église de Reims et copiée de sa main, « a me ex ipsius Remensis Ecclesiæ scriniis descriptum », il lui reconnaît tous les caractères d’une pièce authentique, et l’a insérée en entier dans ses écrits (8).
Viendra-t-on maintenant nous objecter le silence de saint Grégoire de Tours et de Fortunat ? Sans doute, Fortunat est à peu près contemporain : il écrit au VIe siècle ; il est venu à Reims, il a recueilli les faits de la vie de saint Remy, et il ne parle point du sacre de Clovis, c’est-à-dire d’un des évènements les plus importants de cette vie. Mais, ajouterons-nous, il ne parle pas de la conversion et du Baptême de Clovis : ce silence va-t-il nous faire conclure que saint Remy n’a point contribué à la conversion du roi des Francs, qu’il ne l’a point baptisé ? Cet argument prouverait trop, et c’est un principe de droit que celui qui prouve trop, ne prouve rien : Qui nimis probat, nihil probat.
IX. Passons à l’autorité de saint Grégoire de Tours.
1°. L’œuvre de ce père de l’histoire ne nous est point parvenue dans toute son intégrité : les centuriateurs de Magdebourg, ces critiques protestants, citent en faveur de la Sainte-Ampoule un texte de cet auteur, que nous ne retrouvons plus aujourd’hui dans nos éditions en France.
2°. Cet historien est loin d’avoir dit tout ce qui a rapport à saint Remy, à la conversion de Clovis, à son Baptême ; incomplet sur ce point, il a pu passer sous silence le sacre de ce prince, comme fait connu de tout le monde à son époque.
3°. Peut-être, comme le dit le célèbre Vertot, l’Église de Tours disputant à celle de Reims la prérogative de sacrer les rois, saint Grégoire de Tours n’a point voulu trancher la difficulté, en parlant du sacre de Clovis. Il ne le nie point (c’eût été un mensonge) ; il le passe sous silence, et ainsi il ne nuit ni à son Église, ni à la vérité.
X. Fauchet, nous dira Leber, a formellement rejeté l’opinion du sacre de Clovis ; les autres historiens se sont abstenus d’en parler ; et il cite Jean de Serres, Mezerai, Le Gendre, le président Hénault. Nous pourrions grossir cette liste d’opposants, et ne pas en être effrayé. Cette question n’est pas la seule sur laquelle des hommes d’une grande érudition se sont trompés, acceptant de confiance et sans examen les témoignages de ceux qui les ont précédés.
Examinons plutôt sur quoi s’appuient la plupart de ces auteurs qui nient le sacre de Clovis.
1°. « Clovis, disent-ils, n’a pu être sacré roi par saint Remy, puisqu’il était roi depuis quinze ans, au temps de sa conversion ». Cet argument de Du Tillet, de Duplex, de Jean de Serres, etc., aurait quelque valeur, si nous prétendions que c’est l’onction royale qui confère l’autorité sur les peuples, si nous voulions assimiler complètement le sacre de Clovis au sacre de Saül. Mais nous établissons une grande différence entre le sacre des premiers rois de Juda et le sacre des rois chrétiens. Dans la société tout exceptionnelle connue sous le nom de peuple de Dieu, où Dieu est complètement suzerain, au commencement, du moins, le choix du monarque vient immédiatement de Dieu ; c’est lui, et non le peuple, qui le désigne aux acclamations du peuple ; le sacre, fait par un prophète envoyé de Dieu, confère l’autorité, en est une condition essentielle, ou plutôt l’autorité royale est attachée à l’onction elle-même. Au contraire, le sacre de Clovis ne change rien aux conditions de la royauté des Francs : c’est une cérémonie sainte, inaugurée par saint Remy, renouvelée de l’Ancien Testament, pour confirmer aux yeux des populations religieuses l’autorité de Clovis ; mais le peuple conserve son droit d’élire un roi dans la famille des princes chevelus.
2°. « On ne voit pas, dit-on, dans quelles vues Clovis se serait fait sacrer. On ne concevrait pas que saint Remy eût, de son propre mouvement, improvisé ce sacre ».
Nous ne prétendons pas que saint Remy ait surpris Clovis par une cérémonie inattendue de ce prince. Nous pouvons admettre que, dans les instructions données au vainqueur de Tolbiac par l’illustre docteur de l’Église de Reims, lui faisant connaître ses devoirs comme chrétien et comme roi, il lui aura cité les exemples de David, oint par le prophète du Seigneur. Clovis, dans un sentiment religieux, auquel la politique n’aura peut-être pas été étrangère, a pu vouloir se rendre, comme le saint roi David, agréable au cœur de Dieu et inviolable aux yeux des peuples ; il aura compris cette parole du fils d’Isaïe à l’Amalécite qui se vanta d’avoir tué Saül : « Quare non timuisti mittere manum tuam ut occideres christum Domini ? Sanguis tuus super caput tuum : os tuum locutlum est adversum te, dicens : Ego interfeci christum Domini ». Saint Remy, en faisant connaître au roi Clovis toute la beauté de la religion chrétienne, ne lui aura pas laissé ignorer avec quel soin elle protège l’autorité ; il lui aura peut-être expliqué ce texte des Paralipomènes : « Nolite tangere christos meos » ; ce sont là des arguments personnels qui font toujours impression sur les cœurs ; et saint Remy, si remarquable par son éloquence, vir eloquens, potens in scripturis, ne devait point négliger ces moyens humains de persuasion.
3°. « L’Europe, nous dit-on, n’offrait alors aucun exemple de princes civilisés ou barbares inaugurés par l’onction ». — Aussi, ne croyons-nous pas que saint Remy, en cela, ait voulu imiter les empereurs hérétiques de Byzance, ou les rois ariens de l’Italie. Il a vu dans l’Histoire Sainte les premiers rois de Juda sacrés par l’ordre de Dieu : « Sumes lenticulam… » ; instruit, peut-être, sur les destinées futures de la nation française, il a voulu inaugurer l’ère nouvelle de ce nouveau peuple de Dieu (Gesta Dei per Francos) par une cérémonie imitée de l’ancien peuple de Dieu. Saint Remy veut achever son œuvre ; il a fait de Clovis un chrétien par le Baptême ; il l’a marqué par la Confirmation du sceau des soldats de Jésus-Christ ; il en fera aussi le roi très chrétien, le seul roi catholique de cette époque. Pour cela, il le sacre à l’instar des rois de Jérusalem.
4°. « Saint Remy, ajoute Leber, était trop sage pour se substituer à la mission des prophètes, sans consulter l’Église romaine». — Nous ne voyons pas qu’ici saint Remy outrepasse son pouvoir. Dans l’ancienne loi, Saül et David sont sacrés par le prophète Samuel, qui en a reçu de Dieu un ordre spécial ; mais, dans la suite, le droit de verser l’huile sainte sur le front du monarque appartient au grand-prêtre (surtout si l’on admet, avec saint Augustin, le sacre de tous les rois de Juda). Le sacre n’est point un sacrement pour lequel il faille des pouvoirs spéciaux : c’est une simple cérémonie qui ne demande, dans le consécrateur, aucune dignité nouvelle ; évêque, saint Remy pouvait, sans consulter Rome, bénir et consacrer Clovis.
5°. « Il n’existait point de motif de nécessité ; l’Église n’avait rien prescrit ».
— Aussi ne prétendons-nous pas que le sacre fût alors nécessaire.
— « Point de motif d’utilité ; Clovis avait été inauguré par le bouclier ». Aussi n’avons-nous pas dit que Clovis ait tiré une nouvelle autorité du sacre.
— « Point de motif d’intérêt public, la consécration chrétienne ne pouvant rien ajouter, aux yeux d’un peuple encore idolâtre, à la force d’un pacte politique consommé et garanti par quinze années de fidélité ».
— Mais Clovis avait d’autres sujets que les Francs idolâtres ; les Gaulois étaient chrétiens, et Clovis devait, en habile politique, faire reposer principalement son autorité sur cette partie importante de la nation. Ainsi l’avait-il compris, tout païen qu’il était, avant la bataille de Tolbiac, quand il entourait des témoignages de son estime et de sa protection les évêques des Gaules, et surtout l’apôtre de Reims.
6°. « Enfin, saint Remy n’aurait pas entrepris cet acte d’autorité suprême sur un monarque aussi redoutable, sans lui en expliquer le principe et les conséquences ».
Cette objection, répétons-le, s’appuie sur un fondement inexact. L’acte du prélat consécrateur n’est pas un acte d’autorité temporelle ; le sacre n’a jamais donné aux archevêques de Reims puissance sur la couronne de France. C’est une cérémonie religieuse, spirituelle, qui a pour toutes conséquences de confirmer, par l’autorité de Dieu, le pouvoir de celui qui reçoit l’onction sainte. Quand Pépin se fait sacrer par saint Boniface, il ne croit pas ajouter un nouveau degré à la puissance dont il est revêtu par l’élection du peuple ; il veut la rendre plus sainte, plus inviolable aux yeux d’une nation éminemment religieuse.
[1] Un chrétien ne peut nier que la nature ne soit entre les mains de Dieu, qui peut opérer des miracles, quand Il veut et comme Il veut, à la prière de Ses serviteurs.
— Les circonstances, d’ailleurs, étaient graves, importantes ; le saint apôtre pouvait, sans tenter le Seigneur, demander au Très-Haut un miracle, capable de frapper fortement l’opiniâtreté de ce peuple encore grossier, présent au baptême de Clovis ; et Dieu, qui a promis à la foi de transporter les montagnes, s’il en était besoin ; Dieu qui, par l’ombre du prince des apôtres, a opéré tant de guérisons merveilleuses ; Dieu qui, par Son prophète Elisée, a multiplié l’huile de la veuve de Sarepta ; Dieu qui, dans la suite des âges, pour la conversion des Indiens, des peuples de l’Asie, devait accorder à saint François-Xavier des dons si extraordinaires, Dieu ne pouvait-Il pas, je dirais presque, ne devait-Il pas, dans ce jour solennel, faire éclater la puissance de Son bras et la grandeur de Sa bonté pour la nation privilégiée des Francs ?
— À ces conjectures ajoutons des preuves plus précises. D’après le témoignage du pape Hormisdas (Ann. Baronii, ad ann. 514), le ciel renouvela les prodiges extraordinaires que la droite du Très-Haut avait opérés à la naissance de l’Église par le ministère des apôtres. « Apostolorum temporibus æquiparandis, signorum miraculis prædicationem salutiferam comitantibus ». Et saint Remy, dans son testament, parle des prodiges nombreux opérés par son intercession pour le salut des Francs. « Me pastore, plurima signa ad salutem gentis Francorum fecit ».
— Mais quel autre miracle voyons-nous, au Baptême du premier roi des Francs, que celui de la Sainte-Ampoule ? Sans doute, la conversion des cœurs est une œuvre de la toute-puissance divine ; Dieu seul peut opérer en nous le vouloir et le perfectionner, « et velle et perficere » ; toutefois, ce ne sont point là les seuls prodiges que Dieu faisait autrefois par le ministère des apôtres ; c’étaient des faits extraordinaires, palpables en quelque sorte, à la portée de tous, et tels doivent être ceux dont parle la bulle d’Hormisdas. Tel serait le miracle de la Sainte-Ampoule, qu’elle soit apportée par un ange ou par une colombe, ou qu’à la prière de saint Remy, elle ait tout à coup paru sur l’autel.
Ainsi, à nos yeux, la Sainte-Ampoule de Reims vient du ciel ; elle a été donnée à saint Remy par un moyen extraordinaire.
[2] Nous ne croyons pas nécessaire d’avertir ici que l’onction constitue, à proprement parler, le sacre royal. Un sacre, inauguration religieuse d’une autorité souveraine, renferme deux parties bien distinctes : une partie toute politique (couronnement, proclamation du prince par le peuple, investiture par les insignes de la royauté), une partie religieuse, et cette dernière consiste proprement dans l’onction par l’huile sainte : là où cette onction manque, la cérémonie se fît-elle dans le temple saint, au pied de l’autel, par les mains des ministres de la religion qui bénissent le nouveau monarque, il y aura, si l’on veut, inauguration religieuse, il n’y aura pas sacre. Ainsi, dans l’antiquité profane, hors du peuple juif, il n’y a pas un seul sacre véritable. Saint Augustin, attestant ce fait, en donne la raison : « Non alibi ungebantur sacerdotes et reges nisi in illo regno ubi Christus prophetabatur et unde venturum erat Christi nomen ».
— Depuis Jésus-Christ, en dehors du christianisme, il n’y a pas un seul sacre proprement dit. L’inauguration des empereurs romains avant Constantin est politique ou militaire ; Constantin, arborant sur le Capitole l’étendard sacré de la rédemption, ne change rien à ces usages, et avant Théodose le Jeune, aucun prince ne demande à la religion de sanctionner par son intervention une autorité qu’il tient de sa naissance ou de l’élection populaire. Théodose et les empereurs qui lui succèdent sont bénis par les patriarches de Constantinople ; mais avant les croisades, le sacre est inconnu en Orient.
— Chez presque tous les peuples chrétiens de l’Europe, au Moyen-Âge, le sacre existera pour les rois et les empereurs. (Il est introduit en Espagne vers 700, en Suède vers 830, en Angleterre en 959, en Pologne et en Hongrie vers l’an 1000.) Les ducs souverains, les princes à peu près indépendants (ducs de Savoie, de Bretagne, de Normandie, etc.), se feront inaugurer par une cérémonie religieuse ; mais, dans cette société où l’ordre hiérarchique était fidèlement observé, on comprit que des rites particuliers devaient rendre sensible aux peuples l’infériorité de l’autorité ducale relativement à la puissance des rois. Les rites observés seront empruntés au cérémonial de l’inauguration des rois ; mais nulle part nous ne verrons d’onction ; cette cérémonie semble emporter avec elle la conséquence d’une autorité tout à fait indépendante et qui ne relève de personne ici-bas ; elle est l’investiture donnée par Dieu aux souverains, et en ce sens, on peut dire qu’elle emporte un droit divin. Or l’onction, réservée aux rois, est le rite constitutif, la partie essentielle d’un sacre véritable. Là où est l’onction, là est un sacre ; là où elle manque, le sacre n’existe pas. La question se formule donc pour nous en ces termes : Clovis a-t-il reçu une troisième onction, distincte de l’onction baptismale et de l’onction de la Confirmation ?
[3] Dans les rois de la troisième dynastie, depuis le temps de Louis VII, le droit de la cité rémoise ne présente aucune incertitude : les ordonnances des rois, les bulles des papes sont formelles ; Reims est devenu incontestablement la ville des sacres. Depuis Louis VII, un seul roi, Henri IV, est sacré hors de Reims, notre cité étant encore au pouvoir de la Ligue et des Guises.
— Avant Louis VII, le privilège de Reims n’est contesté que par l’autorité d’Yves de Chartres. Or, voici à quelle occasion : le siège de Reims était disputé par deux concurrents, l’un nommé par le roi, l’autre par le pape ; l’interdit fut jeté sur la cité, et aucune cérémonie religieuse ne pouvait s’y accomplir. Dans ces circonstances, Louis VI est sacré à Orléans ; le clergé de Reims réclame contre cette usurpation ; il envoie ses députés à la cour, pour se plaindre de l’entreprise du métropolitain de Sens ; au moins, le Chapitre de Reims obtiendra, par une protestation solennelle, que cet acte ne puisse lui porter aucun préjudice à l’avenir. Les députés affirment que Reims est, de temps immémorial, en possession de mettre la première couronne sur la tête du roi : « primæ regis coronæ primitias ad jus Ecclesiæ Remensis pertinere » ; et ils soutiennent que ce privilège a été concédé à saint Remy par le roi Clovis. Personne ne nie l’assertion du Chapitre de Reims, Le pape, mécontent des évêques de la province de Sens, leur reproche d’avoir empiété sur le droit ancien de la métropole de Reims. C’est alors qu’Yves de Chartres, le plus célèbre d’entre eux, écrit cette lettre fameuse où il s’efforce de justifier ses confrères par la loi de la nécessité : Reims étant en interdit, on ne pouvait s’y rendre. Puis il veut prouver que Reims n’a pas toujours été le théâtre de ces grandes cérémonies, et que les privilèges de cette métropole, si elle en peut produire, sont inconnus aux évêques de la Gaule.
Nous ne nous arrêterons pas à réfuter en détail cette lettre d’Yves de Chartres ; nous dirons seulement que ce privilège de notre métropole n’eût jamais été contesté, si les évêques de la province de Sens n’avaient eu besoin de se justifier d’une usurpation téméraire, et que, précédemment, Yves lui-même, écrivant à l’archevêque de Reims, avait reconnu expressément le droit de nos archevêques de bénir les noces royales : « Id competit juri Ecclesiæ vestræ ex apostolica auctoritate et antiqua consuetudine ». Or, ce droit n’est qu’une conséquence des sacres. Et dans une lettre au pape Urbain, le même Yves de Chartres dit : « Il ne m’appartient point d’instruire Votre Sainteté de l’autorité dont jouit dans la Gaule cette Église de Reims qui possède le diadème du royaume ».
Nous n’avons pas autre chose à établir ici que cette possession de l’Église de Reims ; « sicut antiqua consuetudine fuerat obtentum », dit le pape Alexandre III, dans sa bulle à l’archevêque Guillaume de Champagne, oncle de Philippe-Auguste.
[4] « Alexander, episcopus, servus servorum Dei, venerabili fratri Willemo Remensi, tituli Sanctæ Sabinæ, Apostolicæ Sedis legato, auctoritate apostolica statuimus, ut nemini, nisi Remensi archiepiscopo, liceat regem Francorum inungere aut ei primam coronam imponere, sicut antiqua consuetudine fuerat obtentum. »
Remarquons ces mots : primam coronam ; nous verrons les rois de France, après leur sacre, se rendre à Saint-Denis, y prendre de nouveau la couronne royale. Ce qui a fait croire à plusieurs historiens que le sacre et le couronnement étaient deux cérémonies distinctes, l’une pratiquée à Reims, l’autre réservée à la basilique de Saint-Denis.
[5] Ainsi, en 1059, les bulles d’Hormisdas et de Victor II étaient regardées comme authentiques.
[6] La Chronique de Grégoire de Tours, qui sert de supplément à son Histoire, contient ces paroles remarquables : « Pipinus electione totius Franciæ in sedem regni, cum consecratione episcoporurn et subjectione principum, una cum regina, ut antiquitus ordo deposcit, sublimatur in regno. »
La Chronique de Saint-Bertin est encore plus expresse : « Pipinus, secundum morem Francorum, electus est ad regem et unctus per manus archiepiscopi Bonifacii, et electus a Francis in regno ». Voilà bien les deux parties que nous retrouvons dans les sacres : onction par les mains des pontifes ; élection du peuple ou acclamation.
Les annales de Metz ne fournissent pas un témoignage moins explicite : « Ordinavitque, secundum rnorem majorum, unctione sacra Pipinum piissimum principem Francorum in regem ».
[7] La vénération de Clovis pour notre saint prélat était très grande ; il voulut, sans doute, que tous ses fils reçussent le sacrement de Baptême des mains qui le lui avaient à lui-même conféré.
[8] V. dans le Tractatus apologeticus de Sacra Ampulla, les raisons par lesquelles l’auteur établit l’authenticité du grand testament de saint Remy, et réfute toutes les objections de Chifflet contre cette pièce si remarquable. Nous ne pouvons entrer dans cette discussion, ou plutôt il est inutile de copier ici un travail fait par autrui, et auquel nous n’aurions rien à ajouter.
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